jeudi 25 avril 2013

La naissance des "experts"


Le 25 avril 1953, deux jeunes chercheurs, Francis Crick et James Watson, faisaient une découverte révolutionnaire : ils mettaient en lumière la structure de l'ADN.

Depuis, la possibilité d'établir des empreintes génétiques (et non génitales, n'en déplaise à Brice Hortefeux) a changé considérablement la manière de conduire les enquêtes. C'est en 1986 que, pour la première fois, le généticien britannique Alec Jeffreys met au point la technique des empreintes génétiques.

Photo : © Direction générale de la police judiciaire

Petit tour d'horizon de quelques affaires célèbres résolues grâce à l'ADN :

  • L'affaire Colin Pitchfork


En novembre 1983, à Narborough, au centre de l'Angleterre, lle corps de la jeune Lynda Mann, 15 ans, est retrouvé près d'un hôpital psychiatrique. Elle a été violée et étranglée ; ses vêtements portent des tâches de sperme.

C'est en 1987 que le coupable est retrouvé, dénoncé par un collègue de travail. Le suspect s'appelle Colin Pitchfork, c'est un jeune boulanger de 27 ans. Les policiers font un prélèvement sanguin, et le comparent à l'ADN retrouvé sur le corps de Lynda Mann. Les empreintes correspondent.

Pour la première fois, l'ADN a permis d'arrêter un coupable.

  • L'affaire Gary Doston


Gary Dotson a été le premier suspect dans une affaire innocenté grâce aux tests ADN.

En 1977, une jeune fille de 16 ans, Cathleen Crowell, est retrouvée par un policier dans le quartier de Homewood, à Chicago, où elle vit. Ses vêtements sont sales et en désordre. Elle pleure, et raconte au policier que sur le parking du Mall, trois jeunes hommes en voiture l'ont enlevée, violée, et mutilée avec un tesson de bouteille.

À l'hôpital, elle dénonce Gary Dotson, qu'elle dit formellement reconnaître d'après un portrait-robot de la police. En 1979, le tribunal condamne Gary Dotson.

Mais en août 1988, les tests ADN disculpent Gary Dotson. Il est officiellement réhabilité en 2002 par les autorités de l'Illinois.

  • L'affaire Caroline Dickinson


En juillet 1996, des collégiens britanniques viennent en visite en Ille-et-Vilaine, à Pleine-Fougères.
La nuit, alors que les élèves dorment, un homme pénètrent dans leur dortoir. Il viole Caroline Dickinson, 13 ans, et l'étouffe avec un oreiller.

Lors des investigations, une trace de sperme est relevée sur la cuisse de la jeune fille. Elle permet d'établir une empreinte génétique. Les policiers interrogent les jeunes filles, qui disent avoir vu un homme roder près de l'auberge. Les recherches se concentrent sur un homme : Francisco Arce Montes, un routier espagnol d'une cinquantaine d'années.

Arce Montes a déjà été condamné en Allemagne pour des affaires de viols sur mineures dans des établissements de jeunesse, et est également recherché aux Pays-Bas pour attouchements sexuels. Mais il est introuvable.

C'est un agent de la police de l'immigration des États-Unis qui le repère. Des analyses sont effectuées : les empreintes correspondent à 99,9 %. Arce Montes est jugé en 2004, puis en appel en 2005 : il a été condamné à 30 ans de prison, dont 20 ans de sûreté.

  • L'affaire Courjault


En 2006, Jean-Louis Courjault découvre, dans un congélateur de son appartement de Séoul, deux corps de nouveaux-nés congelés.

Lui et sa femme affirment ne pas comprendre. Ils le soutiennent : ils ne sont pas les parents de ces enfants. Mais quelques jours plus tard, les tests ADN effectués par la police sud-coréenne prouvent le lien de filiation.

Le 22 août 2006, Véronique et Jean-Louis tiennent une conférence de presse, où ils contestent ces tests ADN.

De nouveaux tests sont réalisés en France, qui confirment les précédents. Véronique Courjault avoue alors les meurtres, plus un troisième infanticide.

  • L'affaire Pierre Bodein, dit « Pierrot le fou »


En juin 2004, Pierre Bodein, un braqueur, violeur et assassin multirécidiviste est condamné à perpétuité pour trois meurtres commis dans le Bas-Rhin. Ceux de Jeanne-Marie Kegelin, 10 ans, Julie Scharsch, 14 ans et Hedwige Vallée, 38 ans.

Malgré ses dénégations, son ADN a permis de le confondre. 

mercredi 24 avril 2013

La Vologne garde encore ses mystères


Grégory Villemin a été assassiné en 1984. Photo AFP

J'avais vraiment envie d'y croire. La semaine dernière, Le Parisien annonçait de nouvelles analyses ADN sur les vêtements et les cordelettes qui avaient servi à entraver le petit Grégory. Presque trente ans après ce meurtre, on attend, encore et toujours, qu'il soit élucidé.

Certes, il était difficile de s'attendre à des révélations fracassantes. Mais cet après-midi, à 15h30, le couperet est définitivement tombé : « pas assez d'éléments » pour pouvoir identifier un profil en particulier. Les traces sont « difficilement exploitables », a affirmé le procureur de la République de Dijon, Jean-Marie Beney, lors d'une conférence de presse.

De déception en déception


Les enregistrements de la voix du corbeau ont aussi été expertisés. De ce côté là, aucun élément nouveau non plus, si ce n'est la mise en lumière d'un locuteur masculin, et d'un autre féminin.

Trente ans, six juges d'instruction, deux inculpés, un assassinat et une mère lynchée par l'opinion publique. Et une enquête qui piétine, encore et toujours.

Après avoir lu le livre de Laurence Lacour, Le Bûcher des innocents, je me suis fait ma propre opinion sur cette affaire. Je suis impatiente connaître un jour la vérité. Le dossier reste ouvert. On peut donc croire à une chance – si infime soit elle - de voir un jour l'une des affaires les plus médiatiques du XXe siècle enfin élucidée.

dimanche 14 avril 2013

« Faites entrer l'innocent »

« Faites entrer l'accusé ». L'émission de Christophe Hondelatte – aujourd'hui reprise par Frédérique Lantieri - est culte pour tous les amateurs de faits-divers. 

La parodie de l'émission "Faites entrer l'accusé" par les Guignols de l'info
Elle a été imitée de nombreuses fois, notamment par Yves Rénier et ses Affaires Criminelles, sur NT1.

Imitée, mais aussi parodiée. On connaît depuis quelques temps le célèbre « Fesez entrer celui-là qui est coupable » de l'humoriste Nicolas Canteloup.

Vendredi, ce sont les Guignols de l'Info qui ont créé une très bonne parodie, « Faites entrer l'innocent », présentée par Manuel Valls.

Voir la vidéo à partir de 2'50 : 



Veuillez installer Flash Player pour lire la vidéo

vendredi 12 avril 2013

Petit meurtre entre amis

Hier soir, pour la deuxième fois de ma vie – après les caves du Star- j'ai approché une scène de crime.

J'étais invitée, avec d'autres amis, chez mon ami R., chez qui j'allais pour la première fois. 


Assassinat avenue Marx Dormoy, Clermont-Fd. Photo : Julie L.
C'est quand j'ai vu les scellés sur la porte du rez-de-chaussée que j'ai fait le lien avec ce fait-divers survenu à Clermont-Ferrand le mois dernier. 

« Dis, R., le type qui s'est fait descendre il y a un mois, c'était dans ton immeuble ? 
- Oui, c'était mon voisin du dessous, tu ne savais pas ? 
- Non mais attends... Ton voisin du dessous s'est fait tuer... T'étais chez toi ? T'as entendu des trucs ? Mais raconte ! 
- Mais je l'ai déjà raconté cent fois... » 

J'insiste, je suis tout excitée. Finalement, après quelques verres d'un très bon Saint-Émilion, j'arrive à lui soutirer quelques informations supplémentaires. 


« Mais alors, t'as entendu ou vu quelque chose ? 
- J'ai entendu des claquements de porte. 3 ou 4. Puis du bruit, pas mal de bruit. 
- Et ? 
- Et rien ! Qu'est-ce que tu voulais que je fasse ? Je suis resté chez moi. »

Trop tard, ma curiosité est bien trop attisée pour m'arrêter là.

« Mais... t'es pas sorti voir ? - Si, à un moment. Je voulais aller faire des courses. Mais j'ai pas pu sortir de chez moi car ils étaient en train d'évacuer le corps. Ça m'a énervé.- Trop génial ! »

Il se donne l'air complètement exaspéré. Mais je suis sûr qu'au fond, il est aussi intrigué que moi par cette histoire. On a tous cette propension pour les faits-divers un peu glauques, surtout quand ça se passe près de chez nous. En journalisme, on appelle ça la « loi du mort kilométrique ».

Bruno Exbrayat, 47 ans, a été assassiné par balles chez lui. Photo : Julie L.

Puis il confirme tout ce que j'ai pu lire dans La Montagne, le lendemain du meurtre. 
« C'est vrai qu'il était bizarre. Ses volets étaient toujours fermés, il ne sortait jamais. En tous cas, on ne le voyait jamais. Il paraît qu'il a trempé dans des trafics par très nets, ça ne m'étonne pas. »
Voilà comment un repas entre amis s'est transformé en soirée « Petit meurtre », où on a tous eu en tête, pendant toute la soirée, le fameux « tou dum, tou duuuuum. Tou dum, tou duuuuum » et l'image de Christophe Hondelatte qui enfile son blouson de cuir avant de partir dans la nuit.

dimanche 24 mars 2013

Les gens heureux n'ont pas d'histoire....


...sauf lorsqu'à l'apogée de leur bonheur, ils meurent d'une balle dans la tête.


Et c'est là le centre de l'intrigue des Morts de la Saint-Jean de l'écrivain suédois Henning Mankell.

Un tueur fou s'en prend à un groupe de jeunes gens. À un couple de jeunes mariés. Des personnes qui, a priori, n'ont aucun lien entre eux. 


Wallander connaît ici l'une de ses plus difficiles enquêtes.



Enquête et règlements de comptes



Une enquête d'autant plus difficile que Svedberg, collègue et ami de Wallander, est retrouvé mort chez lui, tué à coups de carabine et atrocement mutilé.

Pas besoin d'attendre très longtemps avant de découvrir que ces deux affaires sont liées. Que Svedberg avait trouvé l'identité du tueur, et que cette découverte lui a coûté la vie.

Au milieu des mises en scènes macabres, on prend un immense plaisir à retrouver Wallander, et son petit univers de Scanie.

L'homme n'est pas au meilleur de sa forme, il se découvre malade. Ses amis veulent quitter la Suède, et lui ne cesse de déchanter face à la société dans laquelle il vit.



« L’espace d’un instant Wallander éprouva une gigantesque amertume. Il avait été policier toute sa vie. Il pensait avoir contribué à protéger ses concitoyens. Mais tout avait empiré autour de lui. La violence avait augmenté. La Suède était devenue un pays où les portes fermées devenaient de plus en plus nombreuses. Parfois, il pensait à son trousseau de clés. D’année en année, le nombre de clé augmentait. De plus en plus de serrures, de plus en plus de codes d’accès. Et au milieu de toutes ces clés, une nouvelle société émergeait, à laquelle il se sentait de plus en plus étranger. »


La décadence de la Suède, une rengaine que l'on retrouvera dans les autres romans d'Henning Mankell, tout comme l'amertume de Wallander, et sa volonté de changer de vie.


Une plume acérée



L'art d'Henning Mankell, c'est aussi celui d'emmener son lecteur dans deux univers : celui de Wallander, où les habitués de la saga ont déjà leurs repères, mais aussi celui du tueur, qui reste perpétuellement anonyme.

Une intrigue complexe mais une écriture fluide, une trame recherchée mais loin d'être cousue de fil blanc : ce roman est, selon moi, l'un des meilleurs que j'aie pu lire de Henning Mankell.


Voir un extrait de l'adaptation Morts de la Saint-Jean par Philip Martin, avec Kenneth Brannagh dans le rôle de Wallander. 

samedi 16 mars 2013

Seznec, un siècle de mystère judiciaire

Vendredi 15 mars, Video les beaux jours organisait une nouvelle projection sur le thème « Filmer la justice ». Le 2 juin 1967, l'émission Cinq colonnes à la une était consacrée à l'affaire Guillaume Seznec.

C'est une affaire comme il en existe peu. Une affaire qui, près d'un siècle après, connaît encore de nombreuses zones d'ombres. 




Le 25 mai 1923, Guillaume Seznec et Pierre Quéméneur, deux notables bretons, quittent Rennes pour Paris. Mais Pierre Quéméneur n'est jamais revenu. En novembre 1924, au terme de huit jours de procès, Guillaume Seznec est condamné aux travaux forcés à perpétuité, et part pour la Guyane. Il ne rentrera en France qu'en 1947.




Une culpabilité évidente ?


Premier mystère de cette affaire : Pierre Quéméneur a-t-il vraiment été tué ? Est-il seulement mort ? Personne n'a jamais retrouvé de corps.

En revanche, on a retrouvé sa valise, tâchée de sang, à la gare du Havre. Valise qui contenait les papiers du disparu, ainsi qu'une promesse de vente d'une propriété appartenant à Quéméneur au profit de Seznec.

Deuxième interrogation : pourquoi Guillaume Seznec dit-il avoir laissé Quéméneur à la gare de Dreux, avant de revenir sur cette affirmation ? Les nombreuses contradictions dans ses dépositions ont alors fait de lui un coupable évident.



Le mystérieux 13 juin 1923

Ce jour là, un télégramme est envoyé du Havre à la famille Quéméneur : « Ne rentrerai Landerneau que dans quelques jours tout va pour le mieux - Quéméneur ». Ce télégramme a-t-il été signé par Quéméneur lui-même ?

Plus étrange encore, plusieurs témoins disent avoir vu Seznec au Havre ce jour-là. Il aurait acheté une machine à écrire, celle que les policiers soupçonnent avoir servi à rédiger la fameuse fausse promesse de vente.

D'autres en revanche affirment avoir vu Seznec à Paris, ce même 13 juin 1923, et d'autres encore disent qu'il était chez lui, en Bretagne. 




La piste de la machination policière

Le 6 juillet, les policiers arrivent pour perquisitionner la scierie de Guillaume Seznec. Ils y trouvent une machine à écrire, cachée. Celle qui aurait été achetée au Havre, quelques semaines plus tôt. 

Or, la fille de Seznec est affirmative : ni leur père, ni leur mère n'était présents lors de la perquisition. Le jeune fils de Seznec, Albert, aurait même affirmé que les policiers -notamment l'inspecteur stagiaire Pierre Bonny - avaient eux-même placé la machine à cet endroit. Mais il n'a jamais été cru, ni entendu lors du procès. 




Une certaine idée de la justice

Frédéric Pottecher, comme à son habitude, ne fait pas que commenter les faits. Il juge aussi. À une époque où les journalistes pouvaient encore se permettre de donner leur avis au public.

« Certes, il y a des faits », énonce-t-il. « Mais cela apporte-t-il suffisamment de certitudes ? Cela suffit-il pour condamner un homme au bagne à perpétuité ? »

La conclusion de Frédéric Pottecher tombe comme un couperet.

« Est-ce vraiment l'idée que vous vous faites de la justice ? »

Depuis l'affaire, quatorze demandes de réhabilitation ont été déposées, la dernière en 2006. Elles ont toutes été refusées.

Il existe aujourd'hui une « loi Seznec », loi du 23 juin 1989, obtenue par le petit-fils de Guillaume, Denis Seznec. Elle permet de faciliter la procédure de révision d'un procès criminel.

vendredi 15 mars 2013

Dominici, Patrick Henry, Ranucci et les autres

Du 11 au 22 mars, l'association Vidéo les beaux jours organise une série de projections- débats sur le thème « Filmer la justice ». Au programme mercredi 13 mars : l'émission Trente ans de télévision sur le thème « Trente ans de faits-divers ».


L'arrestation de Lucien Léger, le 5 juillet 1964

« Le faits-divers, c'est comme une déchirure à travers laquelle une société se révèle ». Ainsi commence Gilles Perrault, qui entame ainsi cette immense rétrospective des plus grands faits-divers de 1954 à 1987.

Le journaliste commente et analyse, à travers les images d'archive, la façon dont la télévision s'est emparée du faits-divers.


Arrestation en direct



D'abord, des interviews exclusives : pour la première fois, on autorise à filmer un accusé pour Cinq Colonnes à la une. Cet accusé, c'est Gaston Dominici, dans la cour de la prison des Baumettes. Quelques années plus tard, c'est Marie Besnard, « l'empoisonneuse », qui s'exprime face aux Français : « Je voudrais que vous puissiez penser une minute seulement que je suis innocente ».
En 1964, c'est une petite révolution télévisuelle : Lucien Léger, « l'étrangleur » du petit Luc Taron, 11 ans, est arrêté en direct pendant le journal de 20 heures.

Des images qu'on ne pourrait plus voir aujourd'hui (voir photo ci-dessus). Depuis la loi Guigou, en 2000, il est désormais interdit de montrer des personnes menottées. Alors que Lucien Léger, lui exhibe clairement ses menottes, comme un pied-de-nez à la famille de la victime. Ce soir, la star, c'est lui.


« La France a peur »



Le pouvoir de la télévision commence à se faire sentir. L'opinion publique réagit, et les acteurs du petit écran font tout pour cela.

L'affaire de Bruay-en-Artois, en 1972, montre la force de l'opinion publique. Après le meurtre de Brigitte Dewevre, une jeune femme, la colère est exacerbée. « Menteur ! Assassin ! » crie la foule derrière la voiture qui emporte le notaire Pierre Leroy, principal suspect à l'époque, au palais de justice.


6 avril 1972 : l'affaire de Bruay-en-Artois éclate par France3Nord-Pas-de-Calais

Mais la force des médias se retrouve surtout ce 18 février 1976. « La France a peur », scande Roger Gicquel lors du JT. Le petit Philippe est mort. « L'affaire Patrick Henry » prend des proportions incontrôlables.



C'est dans ce contexte qu'est jugé, puis condamné Christian Ranucci, le 28 juillet 1976.



Mais Gilles Perrault est, dans cette affaire, juge et partie. En tant que présentateur de cette émission, il n'hésite pas à condamner les médias, qu'il tient responsables de la mise à mort de Ranucci. Un jeune homme accusé à tort selon lui, thèse qu'il développe dans son livre Le Pull-over rouge.


Sensationnalisme



En 1979, c'est la mort de Mesrine et son cadavre au volant de sa voiture qui sont montrés, sans tabou, sur le petit écran. Alors qu'en arrière-plan on voit l'évacuation du corps, les reporters sont sur place, porte de Clignancourt, pour commenter l'événement. Même mort, Mesrine est une star.


LA MORT DE JACQUES MESRINE LE 2 NOVENBRE 1979 A... par mafia93370


Ce documentaire est un bon plaidoyer contre la peine de mort. Il montre, à travers l'évolution de ces faits-divers dans les médias, l'évolution de l'opinion publique elle-même.

Dommage cependant que soient éludées certaines affaires au puissant retentissement médiatique, comme l'enlèvement du Baron Empain, en 1978, ou l'affaire Grégory, en 1984, à peine évoquée.

À travers ces trente ans de télévision, on voit bien, cependant, quel contre-pouvoir peuvent représenter les médias face à une justice souvent intransigeante et parfois défaillante.

lundi 11 mars 2013

« Victor, mauvais sort... »

Sur les trottoirs de Paris, depuis quelques mois, fleurissent d'étranges cercles bleus. À l'intérieur, divers objets. Puis des petits animaux : une souris. Un chat...


« Cette nuit, Paris avait connu deux cercles. Le premier avait été tracé rue du Moulin-Vert et c'est un agent qui l'avait repéré, ravi de sa ronde. L'autre avait été signalé dans le même quartier, rue Froidevaux, par une femme qui était venue se plaindre, parce qu'elle trouvait que ça commençait à bien faire. »

Et dans les cercles, cette phrase, toujours, comme une comptine lancinante : « Victor, mauvais sort, que fais-tu dehors ? »


Visuel de couverture pour les éditions Magnard / Delphine Cordier


Le commissaire Adamsberg est inquiet. Il ne croit pas à une mauvaise plaisanterie. Et son flair ne le trompe pas : bientôt, c'est une femme égorgée qu'on retrouve à l'intérieur d'un cercle.

C'est dans L'homme aux cercles bleus qu'on fait, pour la première fois dans l'oeuvre de Fred Vargas, connaissance avec le commissaire Adamsberg. Un personnage singulier, sensible et solitaire.


« Adamsberg marcha jusqu'au soir. C'était l'unique façon qu'il avait trouvée pour faire le tri dans ses pensées. Comme si grâce au mouvement de la marche, les pensées se trouvaient ballottées comme des particules dans un liquide. Si bien que les plus lourdes tombaient au fond et que les plus fines restaient surface. Au bout du compte, il n'en tirait pas de conclusion définitive, mais un tableau décanté de ses idées, organisées par ordre de gravité. »

La particularité du commissaire, c'est son intuition hors pair, qui lui permet de résoudre les affaires. Petit à petit, Fred Vargas nous le dévoile, tout en laissant planer le mystère sur son passé. Un passé qu'on connaîtra de mieux en mieux, au fil des autres romans de Fred Vargas.

En 2009, Josée Dayan a fait une adaptation de L'homme aux cercles bleus.


L'homme aux cercles bleus (France 2) : bande... par Tele-Loisirs

Dans le rôle d'Adamsberg, le ténébreux Jean-Hugues Anglade. Comme dans le roman, il est accompagné de ses acolytes, Danglard (Jacques Spiesser) et Violette Retancourt (Corinne Masiero).

jeudi 7 mars 2013

J'habite à côté du Star

À Strasbourg, le Star est une institution. Comme cinéma, parce qu'il draine chaque jour des centaines de spectateurs. Mais aussi comme le lieu d'un meurtre atroce. Une affaire qui, de 1995 à 2001, a défrayé la chronique dans la capitale alsacienne.

L'entrée du Star, rue-du-Jeu-des-Enfants, Strasbourg / Julie L.

Étrange disparition


17 mai 1995. Le projectionniste du cinéma, Roland Moog, reçoit un appel sur son lieu de travail. Sa compagne, Carole Prin, est sur le point d'accoucher, elle part pour la clinique. Roland Moog doit l'y rejoindre dès qu'il a trouvé quelqu'un pour le remplacer.

Mais Carole Prin n'arrive jamais à la clinique. Les enquêteurs sont inquiets : a-t-elle été enlevée sur le chemin de l'hôpital ? Ils ont du mal à y croire. Roland Moog, lui, ne semble montrer ni inquiétude, ni émotion quelconque. Il devient le suspect n°1 des policiers. Mais les enquêteurs n'ont aucune preuve pour l'inculper.

Preuve manquante


Mars 1999. Presque quatre ans sont passés depuis la disparition de Carole Prin, et toujours aucune trace de la jeune femme. Roland Moog est pourtant en prison depuis trois mois. La juge d'instruction l'a mis en examen en décembre 1998 : trop de soupçons pesaient sur lui.

C'est alors que le frère jumeau et un ami de Roland Moog font la macabre découverte. En vidant le garage de cet ami, les deux hommes découvrent une malle appartenant à Roland Moog. À l'intérieur : des os et des cheveux. Quelques jours plus tard, Daniel Moog va dénoncer son frère à la juge d'instruction. Les enquêteurs ont la preuve qui leur manquait.

Coupable


Novembre 2001. Le procès de Roland Moog s'ouvre devant la Cour d'Assises du Bas-Rhin. À la barre, il réitère les aveux qu'il a fait aux enquêteurs deux ans plus tôt : Carole Prin et lui se sont disputés dans la cave du Star. Elle voulait le quitter après la naissance de l'enfant. Il n'a pas supporté, il lui a tiré une balle dans la tête.

Des éléments que remettent en cause la partie civile et l'avocat général. Si Carole Prin avait été tuée dans la cave du Star, en pleine journée, les spectateurs auraient entendu la détonation. Par ailleurs, les enquêteurs n'ont retrouvé aucune trace de sang ni de matière humaine dans la cave. En revanche, avec le corps, des débris végétaux pouvant provenir de la forêt.

Cadavre déplacé


Ce qui est sûr, toutefois, c'est que le corps de Carole Prin a bien été emballé dans des sacs, puis emmuré dans la cave du Star. Jusqu'à ce que Roland Moog apprenne qu'une perquisition doive y avoir lieu, et ne déplace le corps dans la fameuse malle.

Le 7 décembre 2001, au terme de neuf jours de procès, Roland Moog est condamné à 25 ans de réclusion criminelle, avec 15 ans de sûreté. Mais on ne sait toujours pas pourquoi le projectionniste a tué sa compagne. Avait-il peur que la venue de l'enfant ne trouble sa double vie bien rangée ?

Pendant des mois, les spectateurs qui quittaient les salles sont donc passés tout près du cadavre de Carole Prin. Aujourd'hui encore, les spectateurs qui quittent les salles passent tout près de l'endroit où, il y a quelques années, était emmuré le corps d'une femme qui s'apprêtait à donner la vie.

Je fais régulièrement partie de ces spectateurs. Bref, j'habite à côté du Star.



Pour en savoir plus sur l'affaire :


Faites entrer l'accusé a consacré l'un de ses meilleurs épisodes à cette affaire, le 25 octobre 2009


France Culture, Sur les Docks, « Roland Moog, projectionniste au Star », un documentaire de Christophe Deleu et François Teste, 7 mars 2006

Europe 1, Café Crimes de Jacques Pradel, 5 mars 2010